José-Manuel Lamarque est journaliste spécialisé dans les questions européennes et expert en géopolitique, plus précisément en géopolitique maritime. Grand reporter à Radio France, il anime sa chronique « Chroniques littérales » du lundi au vendredi à 5h12 sur France Inter. Toujours dans la géopolitique européenne, José-Manuel Lamarque présente également son émission « Micro Européen » sur France info tous les samedi matins.
Un sondage organisé un peu plus tôt cette année a révélé que la majorité des français se sentait mal informée sur l’Europe, en êtes-vous surpris ?
Je ne suis nullement surpris. L’opinion publique entend parler de la Commission européenne, du Parlement européen, mais qui connaît le Conseil de l’Europe ou le Comité des régions ?…
Pensez-vous que les rédactions écartent de manière volontaire le sujet européen et si oui pourquoi ?
Je ne pense pas que cela soit aussi simple. Il y a mille façons de présenter et de parler des questions européennes. Tout ceci dépend d’une bonne formation sur ces questions, pas seulement une formation sur le fonctionnement des institutions européennes, mais aussi les questions européennes demandent surtout une excellente culture générale. C’est la culture générale qui est en perdition. Aussi, concernant les rédactions, dirigées par des responsables, ces derniers et dernières, doivent aussi posséder une excellente culture générale européenne. Il en va de même pour tous sujets.
Les newsletters se sont beaucoup diversifiées ces dernières années (Economie, Politique, Sport, etc) et pourtant très peu concernent l’Europe. Pensez-vous qu’il n’y ait simplement pas de demande de la part des lecteurs ?
Il doit y avoir une demande, mais je pense que les personnes « en demande », sont assoiffées de savoir. Une « newsletter », peut-être, sûrement, mais faite par qui ?…
Pensez-vous qu’un intérêt pour l’Europe soit le propre d’une catégorie socio-professionnelle ?
Il n’y a pas d’intérêt pour l’Europe inhérent à une catégorie socio-culturelle, ce serait une insulte. L’Europe c’est l’affaire de tous, quand on sait comment la présenter, avec des mots simples. Dernièrement je conversais avec un ouvrier retraité. Il m’avouait être en désir de philosophes… tout est dit.
Si oui, comment élargir cet intérêt à un plus grand nombre ?
L’intérêt général passe par l’intérêt personnel. Chacun est concerné par l’Europe, à son niveau, son emploi, sa vie, son lieu de résidence. Il faut cibler et ne pas généraliser. Il est évident que l’Europe du pêcheur ne sera pas l’Europe du montagnard. L’Europe du citadin n’est pas l’Europe du campagnard. Et pourtant c’est la même. Mais partir avec de grands discours, de grandes théories, cela n’a jamais été bénéfique, constructif. J’ai la conviction qu’il faut partir de la base de la pyramide, c’est-à-dire l’histoire de l’Europe, montrer une carte depuis Jules César, voire de l’Europe athénienne. Il n’y a pas que les mots, la carte est vivante, elle dit plus que toutes les théories. Les théories s’inventent, pas les cartes.
En dehors des « grands événements » de l’agenda européen (changement de commissions, référendums, …), pensez-vous que les affaires européennes méritent une place dans le paysage médiatique français ?
Mais le paysage médiatique français est le paysage médiatique européen, et vice-versa. Seulement, ce n’est pas l’Europe « barbante » dont il faut parler, évoquer, avec des élus qui, souvent, rebutent l’électeur. J’ai toujours été d’avis de parler de l’Europe des peuples. Là, nous nous rencontrons tous, parce que le « panier du ménage » est le même pour tous.
Loin de rejeter la faute sur les journalistes français, l’étude met aussi en lumière l’absence du sujet européen à l’Assemblée nationale comme cause majeure. Une solution avancée par l’institut Jean Jaurès serait de dédier une partie des questions au gouvernement aux sujets européens, qu’en pensez-vous ?
Je n’aurai pas la prétention de donner un avis concernant les institutions de la République française, ou toutes autres institutions européennes, voire internationales. Je crois en la force du savoir, de la connaissance, accessibles pour toutes et tous.
Toujours dans le même esprit, une autre solution proposée serait d’inclure un quota européen dans les sujets que les services audiovisuels publics traitent, comme il en existe déjà pour certains sujets en manque de visibilité (Outre-mer, etc…) Pensez-vous que cela soit un bon moyen ?
Les « quotas » sont les « quotas », je ne me prononcerai pas à ce sujet. Je crois en la volonté, rien de plus.
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