Madame Ursula Von der Leyen a dévoilé le 11 septembre dernier la répartition des portefeuilles des commissaires européens. Cette liste doit désormais être approuvée par le Parlement européen qui procédera aux auditions des Commissaires du 30 septembre au 8 octobre avant que le collège n’entre en fonction à partir du 1er novembre prochain. Cette période de transition est l’occasion d’analyser les priorités politiques définies par la Présidente de la future Commission et de faire l’état des lieux des réformes et des actions déjà engagées sur le sujet dans une série de six articles.
Les ambitions de la nouvelle Présidente
La nouvelle présidente de la Commission européenne souhaite que l’Europe devienne le premier continent climatiquement neutre en revoyant à la hausse ses objectifs en allant au-delà, d’ici à 2030, de ceux fixés par l’accord de Paris. Pour y parvenir; l’accent sera mis sur la réduction des émissions, notamment dans le secteur aérien et maritime; ainsi que sur la recherche et le développement des techniques de pointes. De nouveaux fonds publics et privés seront également débloqués à cet effet. Madame Von der Leyen propose également la création d’une taxe carbone aux frontières européennes dans le respect des règles de l’Organisation mondiale du commerce.
« Devenir le premier continent climatiquement neutre au monde est le plus grand défi et la plus grande chance de notre temps »
« J’ai la conviction que ce qui est bon pour notre planète doit être bon aussi pour nos populations, nos régions et notre économie. Nous veillerons à une transition juste pour tous. »
Programme politique d’Ursula Von der Leyen pour la prochaine Commission européenne, juillet 2019
Madame Von der Leyen insiste également sur l’importance d’une transition juste en soutenant les zones rurales et les agriculteurs par des fonds de cohésion et par la mise en place de la stratégie « de la ferme à l’assiette » pour une alimentation durable.
Il est aussi évoqué la création d’un pacte climatique, dont le but est de rassembler tous les acteurs, de l’individu aux multinationales, afin de faire changer les comportements.
La présidente de la Commission souhaite enfin que l’Europe se place en leader de la transition écologique à l’occasion des négociations internationales et par des réformes innovantes.
Où en est-on actuellement en Europe ?
L’environnement est un domaine d’action d’importance croissante dans l’Union européenne. Elle est progressivement devenue, depuis les années 80, une politique européenne dont les compétences sont partagées entre l’Union et les États membres. Elle est de plus inscrite dans les traités et notamment à l’art 11 du Traité sur l’Union européenne qui dispose que l’UE promeut le développement durable. Aujourd’hui, c’est principalement le « Programme d’action pour l’environnement » qui définit l’action de l’Union pour la période 2014-2020. L’Agence européenne pour l’environnement (AEE) installée à Copenhague depuis 1993 est également un acteur important. Grâce à ses études et analyses, elle informe et alerte les décideurs et le grand public sur les risques environnementaux.
> L’Europe : le premier continent climatiquement neutre ?
Actuellement, l’Europe produit moins de 13% des émissions de gaz à effet de serre mondiales. La première mesure européenne destinée à réduire les émissions de gaz à effet de serre a été adoptée en 2009, il s’agit du « Paquet sur le climat et l’énergie à l’horizon 2020 ». Ce dernier fixait trois grands objectifs :
- Réduire les émissions de gaz à effet de serre de 20%
- Porter à 20% la part des énergies renouvelables
- Améliorer l’efficacité énergétique de 20%
Ces objectifs ont été réévalués par le cadre d’action en matière de climat et d’énergie adopté en 2014. L’accord de Paris signé en 2015 prévoit quant à lui la neutralité des émissions pour 2050, ce qui signifie qu’un pays ne peut pas émettre plus de gaz à effet de serre qu’il ne peut en absorber. Un objectif que souhaite également atteindre Mme Von der Leyen. Pour ce faire, le Présidente de la Commission devra surmonter les réticences de certains pays. En effet, lors du Conseil européen de juin dernier, la Pologne, la Hongrie, la République tchèque et l’Estonie se sont opposées à un texte prévoyant la neutralité carbone pour 2050. Ces pays ont refusé de prendre cet engagement « sans en connaître le coût ». Les États membres ne sont d’ailleurs toujours pas d’accord sur un relèvement de leur ambition commune malgré le fait que leurs engagements onusiens leurs imposent de le faire d’ici à 2020, ce que souhaiterait également la Présidente.
> Le financement de la politique environnementale européenne
La politique environnementale prend une part de plus en plus importante du budget européen. Actuellement, il existe plusieurs instruments financiers pour financer les actions de l’Union européenne dans ce domaine. Le plus important est le programme LIFE +, doté d’un budget de 3.4 milliards d’euros pour la période 2014 – 2020. Ce programme a permis de financer près de 4 500 projets depuis 1992. La Commission souhaite porter ce budget à 5.4 milliards d’euros pour la période 2021 – 2027.
Au-delà de ce programme, de nombreux autres instruments financiers existent, l’Europe consacrant ainsi environ 20% de son budget total à la lutte contre le changement climatique et à la défense de l’environnement. Elle peut également s’appuyer sur d’autres budgets européens intégrant le volet écologique dans les programmes qu’ils financent. Il s’agit notamment de la PAC dont un des objectifs concerne le « verdissement » de l’agriculture ; du fonds européen pour le développement rural (FEADER), du fonds européen de développement économique régional (FEDER) ainsi que du fonds de solidarité ou encore l’aide au développement.
La Banque européenne d’investissement (BEI) consacre quant à elle 25% de ses financements au climat ; l’objectif de la Présidente de la commission européenne est de transformer cette partie de la BEI en Banque européenne du climat. A en croire la Mme Von der Leyen, tous ces fonds sont donc destinés à être augmentés et le secteur privé sera également sollicité notamment pour financer une transition équilibrée entre les territoires
> L’Europe, un leader en matière environnementale ?
La nouvelle Présidente de la Commission souhaite que l’UE soit un acteur majeur sur la scène internationale concernant les questions environnementales. Lors des négociations de l’accord de Paris sur le climat en 2015, l’UE a joué un rôle de premier plan en tant que première grande économie à présenter sa contribution prévue au nouvel accord, dès mars 2015.
Néanmoins, pour véritablement parvenir à se placer en tant que leader de la lutte contre le changement climatique, l’UE devra réussir à surmonter ses divisions internes et à convaincre ses partenaires de mettre en œuvre leurs engagements. Il existe de plus de fortes disparités entre les pays membres concernant la variation des émissions de CO2, alors que le Portugal a baissé ses émissions de presque 10% en 2018, la Lettonie les a quant à elle augmenté d’environ 8% la même année. En effet, selon une étude publiée l’an dernier par plusieurs centres de recherche sur le climat, sur les 197 pays signataires de l’accord de Paris, seulement 16 ont déjà défini un plan d’action climatique qui permettrait d’honorer leur engagement. Parmi ces pays, aucun n’est membre de l’Union européenne.
Pour plus d’informations sur ce sujet nous vous invitons à lire l’article de Toute l’Europe ainsi que celui d’Alternatives Économiques.
Pour en savoir plus sur les orientations politiques pour la prochaine commission européenne cliquez ici.