Au micro de BFM Business, Yves Bertoncini nous livre son analyse sur la stratégie de Boris Johnson vis-à-vis du Brexit et du Parlement britannique.
Contexte
En ce début du mois de septembre 2019, Boris Johnson a perdu plusieurs batailles :
- les parlementaires ont adopté un projet de loi qui prévoit que s’il ne trouve pas un accord avec les Européens d’ici la mi-octobre, la date butoir du Brexit sera reportée à la fin janvier
- la motion que Boris Johnson voulait faire passer pour imposer des élections législatives a été rejetée.
Un Brexit sans accord ou avec ?
« Boris Johnson a perdu ses dernières batailles, mais il n’est pas un canard sans tête. Sa stratégie, c’est d’aller de l’avant, d’essayer de passer en force. Il cherche avant tout à obtenir un Brexit, si possible avec accord, sinon sans accord – mais le Parlement vient de dire qu’il ne voulait pas de Brexit sans accord« , analyse Yves Bertoncini.
Des élections législatives anticipées sont-elles toujours envisageables ?
« Boris Johnson souhaite toujours dissoudre le Parlement. Cela est envisageable si une résolution qui empêche un Brexit sans accord – comme le demande Jeremy Corbyn [leader du parti travailliste, NDLR] – est adoptée. Dans ce cas-là, les élections se tiendraient vers la mi-octobre, et le Brexit serait reporté au mois de janvier 2020. », indique le Président du Mouvement Européen-France.
Une renégociation d’accord possible avec les Européens ?
L’accord négocié avec Theresa May a été rejeté trois fois par le Parlement britannique. « Pour les Européens, l’avantage d’avoir soumis cet accord au Parlement britannique, c’est d’avoir vu les points qui posent problème, notamment la frontière irlandaise. » [NDLR : L’Union européenne souhaite éviter le rétablissement d’une frontière entre l’Irlande du Nord et la République d’Irlande ; il s’agit là d’une ligne rouge pour le Parlement britannique qui considère que la solution proposée d’un check point serait une atteinte à l’intégrité territoriale et constitutionnelle du Royaume-Uni].
« Les Européens sont réalistes ; si les Britanniques affirment aux Européens qu’ils ont les moyens de faire passer au Parlement britannique un texte qui sera le frère de l’accord actuel, il est possible que ces derniers fassent les gestes nécessaires à la renégociation d’un accord très proche.
Yves Bertoncini ajoute : « Il est dans l’intérêt des Européens de ne pas reporter ad vitam eternam le sujet, de le régler une bonne fois pour toutes, pour pouvoir passer à de nouveaux projets. »
Un Brexit sans accord vaudrait, selon les derniers chiffres de la Banque d’Angleterre, une récession de 5,5% au Royaume-Uni. De la part de Boris Johnson, pourquoi l’envisager ?
Selon le Président du Mouvement Européen-France, « L’Europe a toujours été un terrain de lutte politicienne au Royaume-Uni, utilisée pour régler des comptes en interne. Récemment, les hommes politiques ont fait en sorte que Theresa May devienne Premier ministre, pour lui faire faire le sale boulot, et prendre sa place. Dans le contexte actuel, il s’agit pour les politiciens de l’arène de montrer leurs muscles. Au-delà de l’analyse, on peut penser que ces divisions idéologiques sont irresponsables au vu de ce qu’elles coûtent à l’économie. »
« De manière pragmatique, Boris Johnson a intérêt qu’il y ait une sortie avec accord. Un accord négocié créerait un choc de stabilité pour son pays car il bénéficierait de la conjoncture positive d’avoir « réglé la crise » ; s’ensuivrait une période de stabilité de deux ou trois ans, le temps que les dispositions de l’accord se mettent en place ; en outre, il bénéficierait d’un choc d’offres des investisseurs qui ont jusqu’ici retenu leurs investissements. »
Pour revoir l’interview [15’30 à 26’20] :