Si l’Union européenne ne peut pas tout, elle agit dans de nombreux domaines pour améliorer le quotidien de ses citoyens. C’est pourquoi le Mouvement Européen France a développé des argumentaires pour défendre les acquis de l’Europe et des ripostes pour combattre les idées reçues
Rappel : qui ratifie les accords commerciaux et pourquoi ?
Pour rappel, le CETA est un accord de compétence «mixte», qui doit être ratifié non seulement par le Conseil de l’UE (les 28 gouvernements nationaux) et par le Parlement européen, mais également de manière individuelle par chacun des États membres de l’UE, parce qu’il contient non seulement des dispositions relevant de la «compétence européenne» en matière commerciale, mais aussi des dispositions pour lesquelles la compétence est «partagée» entre l’Union européenne et les États membres :
- Pour faire simple, tout ce qui concerne le commerce des marchandises et des services (l’essentiel de l’accord) relève de la compétence exclusive de l’Union européenne en la matière. C’est le Traité de Rome, en 1957, qui a donné à l’échelon européen cette compétence en matière commerciale, qui découlait de l’établissement de l’union douanière et qui permettait aux États européens de parler d’une seule voix et de peser plus lourd pour faire valoir leurs intérêts à l’échelle internationale. La Commission européenne est chargée de négocier les accords commerciaux. Ils sont ratifiés par les États membres de l’UE, qui gardent le contrôle de la politique commerciale, en l’exerçant collectivement au sein du Conseil de l’UE. Depuis 2009, à la suite du Traité de Lisbonne, le Parlement européen jouit d’un rôle équivalent et doit lui aussi ratifier les accords commerciaux (il en a déjà ratifié plusieurs, mais il a également rejeté un accord sur la lutte contre la contrefaçon). C’est comparable à ce qui se passe pour les directives et les règlements européens, notamment tout ce qui concerne le marché unique européen : la Commission propose et le Conseil et le Parlement européen disposent. Voilà pour le commerce des marchandises et des services.
- Dans le cas du CETA, une petite partie de l’accord va au-delà de la compétence européenne en matière commerciale et recouvre des compétences qui sont partagées par le niveau européen et le niveau national. C’est notamment le cas du tribunal public international qu’établit le CETA pour assurer la protection des investissements à l’étranger. Pour ce type de sujets, il y a toujours une compétence nationale en plus de la compétence européenne. Le droit européen prévoit donc qu’il y ait également un processus de ratification au niveau national en plus du processus de ratification au niveau européen.
- C’est la raison pour laquelle le CETA, déjà ratifié par le Conseil de l’UE (à l’unanimité) et par le Parlement européen (à une majorité de 408 pour, 254 contre), doit également être ratifié par les 43 parlements nationaux (et régionaux dans le cas de la Belgique) de l’UE.
La ratification au niveau national n’est nécessaire que du fait de la petite partie du CETA qui n’est pas couverte par la compétence européenne en matière commerciale mais elle porte bien, de fait, sur l’ensemble de l’accord. La partie commerciale, de compétence européenne, est cependant appliquée de manière provisoire (en attendant la ratification complète de l’accord) dès que le Parlement européen a donné son feu vert. C’est le cas pour le CETA depuis le 21 septembre 2017.
Que se passe-t-il en cas de vote négatif d’un Parlement national ?
La déclaration n° 20 du Conseil de l’UE, adoptée en parallèle de l’adoption de la décision par le Conseil de l’UE de signer le CETA (http://data.consilium.europa.eu/doc/document/ST-13463-2016-REV-1/fr/pdf), est très claire.
À partir du moment où le processus de ratification du CETA dans un État membre de l’UE aboutit à un rejet du CETA et que l’État membre en question le notifie au Conseil, «l’application provisoire devra être et sera dénoncée». Ce qui veut dire que, non seulement la partie du CETA qui concerne la protection des investissements étrangers, qui n’est pas appliquée aujourd’hui, ne le sera jamais, mais que la partie qui relève de la compétence européenne et qui est appliquée aujourd’hui de manière provisoire, suite au vote favorable du Conseil et du Parlement européen, tombera également.
En effet, c’est l’ensemble du CETA, en un seul bloc, qui est présenté à la ratification des États membres. L’application provisoire de la partie couverte par la compétence européenne n’existe qu’en attendant la ratification de l’accord par l’ensemble des parlements nationaux. Si celle-ci devient impossible, l’application provisoire cesse.
Pour être tout à fait complet, il faut noter que la déclaration du Conseil ne dit pas qu’un vote négatif d’un parlement national entraîne automatiquement la dénonciation de l’application provisoire par le Conseil. Le Conseil doit pour cela être saisi formellement par l’État membre qui estime être dans l’incapacité définitive de ratifier le CETA. Cela ne préjuge pas de ce qui pourrait se passer après un vote négatif d’un parlement national, le Conseil ne s’immisce pas dans les affaires intérieures des États membres. La déclaration du Conseil spécifie par ailleurs qu’une fois saisi, celui-ci prendra les dispositions nécessaires à la dénonciation de l’application provisoire du CETA conformément aux procédures de l’UE.