À Belfort, l’Université d’automne 2025 du Mouvement Européen – France a réuni près de 140 participants autour de quatre jours d’ateliers et formations sur les enjeux européens ainsi que 4 conférences consacrées au défi de la souveraineté européenne. Cette édition a permis d’explorer les principales dimensions de la souveraineté à l’échelle de notre continent — alimentaire, industrielle, démocratique et numérique — en croisant expertise politique, témoignages du terrain, analyses économiques et perspectives citoyennes. Voici les temps forts des quatre conférences qui ont rythmé l’événement.
Au fil de trois sessions d’ateliers complémentaires, les participants à l’édition 2025 de l’Université d’Automne ont eu l’opportunité d’explorer en profondeur les grands défis européens d’aujourd’hui : de la compréhension de propositions clés comme le rapport Draghi, aux enjeux de défense, des relations entre la Suisse et l’Union européenne ou encore de transition écologique et de budget de l’Union.
Les ateliers ont permis aussi de développer des compétences concrètes — préparation d’un plaidoyer commun pour les élections municipales 2026, construction de partenariats, élaboration des résolutions politiques du Mouvement Européen, amélioration des pratiques associatives ou encore mise en place de projets européens. Guidés par des intervenant·es engagé·es, ces temps d’échange avaient pour objectif de favoriser un travail collectif riche, mêlant expertise, partage d’expérience et réflexion stratégique pour renforcer l’action du Mouvement Européen – France sur tout le territoire.


1. Souveraineté alimentaire : produire autrement pour protéger durablement
La conférence a réuni des acteurs aux profils complémentaires, de l’agriculture à la finance, en passant par l’action politique et syndicale. Irène Tolleret a rappelé la distinction fondamentale entre sécurité alimentaire (garantir l’accès à une alimentation sûre et suffisante) et souveraineté alimentaire (donner aux citoyens le contrôle sur leurs systèmes agricoles). Dans un contexte de tensions géopolitiques et climatiques, ces deux notions se rejoignent plus que jamais.

Les interventions ont convergé sur un diagnostic : filières fragilisées, dépendance accrue aux importations, perte de surfaces agricoles et revenus trop faibles pour les agriculteurs.
Sylvain Marmier, président du Crédit Agricole Franche-Comté, a souligné l’urgence d’une politique agricole plus stratégique, moins dépendante des capitaux étrangers et davantage généraliste à l’échelle de chaque continent, tandis que Jean-Noël Monnier, président de la FDSEA du Territoire de Belfort, a alerté sur la baisse de l’autonomie alimentaire locale. Anna Maillard, présidente de l’association « Les jardins d’idées », a défendu les circuits courts, l’agroécologie et la protection du foncier comme leviers essentiels de résilience.
Au cœur des propositions : renforcer les initiatives locales, responsabiliser les distributeurs, sécuriser les filières, investir massivement dans la transition agricole et soutenir les agricultures durables.
2. Transition écologique et compétitivité : l’industrie européenne à la croisée des chemins
Modérée par Véronique Auger, journaliste, cette conférence a mis en lumière les défis d’une industrie européenne confrontée à la transition écologique, à des choix politiques déterminants et à une concurrence internationale exacerbée.
Le recul industriel européen — passé de 34 % des emplois en 1991 à 24 % en 2023 — illustre la fragilisation d’un secteur stratégique. Christophe Grudler, député européen (Renew Europe), est revenu sur le Net Zero Industry Act, texte clé pour relocaliser la production des technologies de transition. Sylvain Waserman, président directeur de l’ADEME, a montré que la décarbonation n’est plus une option mais un impératif : les entreprises non décarbonées pourraient perdre jusqu’à 70 % de leur chiffre d’affaires d’ici 2030, notamment en raison de la volatilité du gaz et du coût croissant du carbone.

Les intervenants ont également insisté sur :
– l’importance de compter le carbone sur toute la chaîne de valeur,
– la nécessité d’utiliser davantage les fonds européens, encore sous-consommés,
– le rôle décisif des territoires et des partenariats public–privé,
– une stratégie énergétique cohérente, incluant nucléaire, hydrogène et énergies renouvelables.
La conférence a montré que la transition écologique n’est pas seulement technique : elle implique des choix de société et une réorganisation profonde du pacte social et industriel.
3. Souveraineté démocratique : une démocratie européenne sous tension
Avec Hervé Moritz, président du Mouvement Européen – France, et Gwendoline Delbos-Corfield, ancienne députée européenne et présidente de la Green European Foundation, cette conférence a exploré la fragilité croissante des démocraties européennes. Hervé Moritz a rappelé que la démocratie est un instrument de souveraineté autant qu’un pilier d’influence extérieure.
Gwendoline Delbos-Corfield, forte de son expérience de rapporteure sur l’Etat de droit en Hongrie, a présenté les travaux menés sur les risques de « choc autoritaire » dans plusieurs États membres.
Ses conclusions sont sans appel : institutions fragilisées, concentration médiatique, pressions sur la justice, rôle essentiel de la société civile, et risques d’ingérence étrangère.

Les principales menaces identifiées :
– crises successives (sanitaires, géopolitiques, économiques),
– montée des extrêmes,
– financements étrangers visant à influencer les débats sociétaux,
– perte de confiance citoyenne.
Les pistes proposées incluent un renforcement des contre-pouvoirs, une meilleure protection des médias, une indépendance accrue de la fonction publique et une coopération européenne plus solide.
L’enjeu : protéger la démocratie sans trahir les principes démocratiques eux-mêmes.
4. Intelligence artificielle : l’Europe en quête de souveraineté numérique
Sous la modération d’Aurore Laloux, présidente des Jeunes Européens – France, Sandro Gozi, député européen (Renew) et Eric Barbier, journaliste, ont abordé un sujet devenu incontournable : l’avenir de l’IA et la position de l’Europe dans une course mondiale menée par les États-Unis et la Chine.
Eric Barbier a expliqué les fondements techniques des modèles de langage et le coût colossal de leur développement. Les risques identifiés sont majeurs : manipulation de l’information, désalignement des modèles, ingérence dans les processus démocratiques.
Sandro Gozi a dressé un constat clair : l’Europe est en retard, faute d’investissements massifs et d’un cadre industriel solide. Face aux géants américains et chinois, l’Union doit définir un modèle propre, fondé sur ses valeurs : droits fondamentaux, interdiction de la surveillance de masse, transparence, souveraineté numérique.


Les intervenants ont plaidé pour :
– développer des champions européens,
– investir dans les compétences et l’éducation,
– maîtriser l’impact environnemental des datacenters,
– renforcer l’IA Act pour éviter une dépendance technologique stratégique.
La souveraineté numérique se joue maintenant : sans vision ambitieuse, l’Europe risque de devenir simple consommatrice de technologies conçues ailleurs.
Conclusion : quatre angles, une même question centrale
De l’alimentation à l’énergie, de la démocratie à l’intelligence artificielle, les quatre conférences de l’Université d’automne 2025 convergent vers un même enjeu : comment l’Europe peut-elle rester maîtresse de son destin ?
Pour les intervenant·es, la réponse est claire : en renforçant ses capacités internes, en s’appuyant sur les territoires, en investissant massivement dans les transitions et en réaffirmant ses valeurs.
Cette édition aura démontré que la souveraineté européenne n’est pas un concept abstrait : c’est un ensemble de choix concrets, urgents et profondément politiques, qui déterminent notre avenir collectif.
Le Mouvement Européen – France tient à remercier chaleureusement ses partenaires :
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Les sections locales du Mouvement Européen – Franche-Comté et Territoire de Belfort
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Les Jeunes Européens – France
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Le Ministère de l’Europe et des Affaires étrangères
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FDVA – Fonds pour le Développement de la Vie Associative
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La Région Bourgogne–Franche-Comté
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UTBM – Université de Technologie de Belfort-Montbéliard
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ÉSTA – School of Business & Technology Belfort
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DEMOCRATS – European Democratic Party

Merci à tous les participants d’être venu à Belfort pour cette édition 2025 de l’Université d’Automne du Mouvement Européen – France !