Yves Bertoncini, Président du Mouvement Européen – France, était l’invité de C’est arrivé cette semaine sur Europe 1 ce samedi 23 mai à la veille du sommet informel sur les migrations puis du Conseil européen des 28 et 29 juin, qui voient Emmanuel Macron et Angela Merkel présenter la feuille de route franco-allemande de Meseberg et les Européens s’affronter sur la politique migratoire.
Emmanuel Macron et Angela Merkel ont présenté en Allemagne une « déclaration d’architecte, une feuille de route qui porte sur beaucoup de sujet : sécurité, traitement des défis migratoires, approfondissement de la zone Euro ou encore quelques questions institutionnelles » note Yves Bertoncini. Elle traduit la volonté d’Emmanuel Macron « d’avoir une vision pour l’Europe, de tracer des perspectives et puis d’essayer d’avancer ».
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Néanmoins, le Président du Mouvement Européen pointe les délais fixés par le texte. « Le budget de la zone euro, c’est pour 2021 et on ne sait pas encore ce qu’il y aura dedans ». Les plans d’Emmanuel Macron sont « percutés par les crises qu’il faut gérer dans l’urgence et notamment en matière migratoire ».
Budget de la zone euro : une victoire symbolique ?
Yves Bertoncini voit dans la proposition d’un budget de la zone Euro « une victoire politique et symbolique pour Emmanuel Macron. Mais il s’interroge : est-ce que ça valait cette débauche d’énergie politique au moment où il y a des défis plus pressants ? ».
Le Président du Mouvement Européen rappelle que « les Allemands ont déjà beaucoup concédé dans le traitement de la crise de la zone euro. Et parce qu’ils ont déjà fait beaucoup d’effort et qu’ils ont l’impression que la crise de la zone euro est derrière nous, il est d’autant plus difficile de les faire aller plus loin. »
« N’oublions pas que le parti d’extrême-droite Alternative für Deutschland (AFD) s’est d’abord constitué sur le refus de toute solidarité européenne en matière financière et puis qu’il a progressé sur l’autre sujet brulant de l’heure, c’est-à-dire l’accueil des réfugiés » complète-t-il.
Une solidarité financière illustrée par le retour de la Grèce sur les marchés financiers, « un retour à la normale » qui fait suite « à de nombreux sacrifices pour les grecs » rappelle Yves Bertoncini, pour qui « les Etats doivent emprunter sur les marchés et non pas entre eux ».
« On est face à une crise de nerfs, pas face à une crise migratoire »
Interrogé sur le sommet européen informel sur les migrations qui s’est tenu ce dimanche 24 juin avec 16 pays européens, Yves Bertoncini analyse l’organisation d’un « sommet cathartique pour qu’une dizaine de pays se disent les choses », suite à l’arrivée de la Ligue en Italie ou encore de la mise sous tension de la CSU, l’allié bavarois d’Angela Merkel, par l’AFD lors d’élections locales Allemagne :
« On est face à une crise de nerfs, pas face à une crise migratoire. La crise migratoire est derrière nous, malgré l’arrivée symbolique de quelques bateaux. Les migrants sont arrivés massivement en 2015 -2016, notamment parce qu’Angela Merkel leur a tendu les bras. Depuis il y a eu des accords avec la Turquie, on essaye d’en faire avec la Lybie, le flux s’est tari. »
Emmanuel Macron mis sous pression par ses partenaires
Si la France est en pointe « sur le traitement à la source des crises migratoires » et que « la France et l’Allemagne proposent que le corps européen de garde-frontières soit porté à 10 000 hommes », c’est sur la solidarité européenne dans l’accueil des migrants et des demandeurs d’asile que les Européens s’affrontent.
Les pays qui n’ont pas été confrontés à la vague massive de 2015, comme la France ou l’Espagne, sont désormais « mis sous pression par leurs partenaires qui leur disent ‘aidez-nous un peu plus’ » analyse Yves Bertoncini. Il pointe la circonspection des partenaires Italiens face aux positions françaises : « Parce que la France n’a pas été solidaire. Elle s’était engagée à accueillir 30 000 demandeurs d’asile relocalisés, on en est à 5 000 en deux ans, dont seulement 635 depuis l’Italie ». Il explique plus avant le ressentiment italien, face à une France source du « chaos » en Libye et qui sur le plan migratoire rétablit le contrôle à sa frontière de Vintimille.
Deux ans après le Brexit, Trump en incubateur de l’unité européenne
Deux ans après le référendum sur la sortie du Royaume-Uni de l’UE, Yves Bertoncini rappelle que « le Brexit a douché l’europhobie. Les peuples d’Europe ne veulent pas sortir de l’Union. Simplement ils restent membres et se disputent sur de nombreux points, on vit une crise de copropriétaires ».
« Donald Trump nous sauve d’une certaine manière, l’Europe est confrontée à un monde de plus en plus instable. Tout est dangereux à ses frontières et notre protecteur traditionnel, l’oncle Sam, ne nous protège plus. Et les Européens sont obligés de serrer les rangs, de prendre leur destin en main comme le dit la chancelière Angela Merkel » conclut-il sur Europe 1.