Si la crise des réfugiés appartient désormais au passé, les passions identitaires qu’elle a soulevées nourrissent désormais la montée des populismes dans les pays occidentaux. Yves Bertoncini, Président du Mouvement Européen – France, était sur France Info aux côtés de Jacques Rupnik, Directeur de recherches au CERI de Sciences Po, pour décrypter ce phénomène.
Yves Bertoncini explique que les peuples occidentaux sont dans un moment de replis sur eux-mêmes : « lls ont longtemps été au centre du monde mais ils voient bien que, autant sur le plan économique et financier que du point de vue démographique, ils ne sont plus dominants ». Pour lui, cette situation « crée une angoisse identitaire sourde qui a avivé la crise des réfugiés ». Le Président du Mouvement Européen précise cependant que cette crise est derrière nous mais que ses effets se font beaucoup ressentir car « l’horizon de l’Europe c’est d’être confronté de plus en plus à un monde multiculturel qui convient à la majorité des Européens mais qui angoissent les autres ».
La montée des populismes a-t-elle été causée par la crise économique de 2008 ?
Yves Bertoncini confirme qu’il s’agit effectivement de la plus grave crise économique depuis celle de 1929, mais il souligne que certains pays avaient des systèmes de protection sociale plus développés que d’autres, ce qui a limité les dégâts. Par contre, il rappelle que « l’Europe a eu de grandes difficultés à mettre les États et les peuples d’accord pour porter secours à la Grèce ou encore à l’Irlande ». De cette situation résulte le développement de deux populismes, selon Yves Bertoncini : « D’un coté ceux qui n’ont pas voulu être solidaires avec les grecs et de l’autre le refus de solidarité migratoire ».
Le Président du Mouvement Européen – France souligne que dans cette crise, l’Europe a été perdante sur les deux tableaux. Bien qu’elle ait fait le nécessaire, « comme la solidarité financière de l’Europe a été accordée avec des contreparties, cela a généré un euroscepticisme anti austérité ».
Le développement de l’Europe social, un moyen de lutter contre le nationalisme ?
Yves Bertoncini explique qu’en réalité, la politique sociale doit d’abord fonctionner au niveau national, même si l’Union européenne propose un socle social : « Il y a des règles de base en matière de droit du travail, de protection des travailleurs ». Il note cependant qu’il y a un déséquilibre, parce que lorsque l’Union européenne cause des dégâts sociaux on l’empêche de les réparer. Il prend en exemple le fond d’ajustement à la mondialisation contre lequel certains pays comme l’Allemagne ou les pays du nord luttent « parce qu’ils considèrent qu’ils ont un modèle social qui est correct ».
Le Président du Mouvement Européen en conclut : « Ce qui nourrit le nationalisme ce n’est pas tant cette dimension sociale que la dimension identitaire ». Une dimension identitaire qui angoisse les Européens qui se trouvent dans une situation démographique telle qu’elle nécessite un apport migratoire. Pour Yves Bertoncini, c’est cette dimension « qui nourrit de manière beaucoup plus durable les partis nationalistes, bien plus que les frustrations sociales issues de la crise de 2008 ».