Réunis en Conseil européen à Bruxelles, les dirigeants de l’Union européenne se sont entendus jeudi 12 décembre 2019 sur l’objectif d’atteindre la neutralité carbone d’ici à 2050… Sans la Pologne, qui a obtenu plus de temps. Grâce au documentaire en édition spéciale sur LCP intitulé « Sommets : Dans les secrets des négociations européennes – 1ère Partie », le réalisateur Yann-Antony Noghès nous plonge de manière inédite dans les coulisses du sommet européen sur les discussions autour du climat. Il met notamment en exergue les différents rapports de force entre les chefs de gouvernement, dont l’objectif principal est de défendre les intérêts nationaux, tout en trouvant un consensus sur la question climatique.
Yves Bertoncini, Président du Mouvement Européen-France, Yann-Antony Noghès le réalisateur de ce documentaire, et Jean Quatremer, correspondant européen chez le journal Libération étaient tous les trois les invités de cette émission spéciale sur LCP présentée par Elizabeth Martichoux, afin d’analyser et décortiquer les évènements de ce sommet européen.
Au sein du Conseil européen, le rôle du président est primordial, d’autant plus lors des sommets européens où les enjeux sont importants et où une médiation entre les chefs d’Etats est nécessaire. C’est ce que nous explique Yves Bertoncini tout en affirmant que Charles Michel, étant l’ancien premier ministre belge, est très bien préparé pour ce rôle puisque « la politique en Belgique, c’est l’art du compromis entre des régions et des communautés différentes », et ajoute que le poste de premier ministre belge est « un bon Erasmus pour arriver au poste du Président du Conseil européen ». Charles Michel joue donc un rôle majeur au niveau européen et « ce premier sommet pourrait être considéré comme son baptême du feu ».
Cette négociation sur le climat représente pour Yves Bertoncini le « grand dessein du nouveau cycle politique ». En effet, après le marché unique, la monnaie unique, et le grand élargissement au sein de l’Union européenne, « Ursula von der Leyen prend la tête de ce nouvel horizon qui est la pacte vert européen et qui contient un objectif cardinal : la neutralité climatique à l’horizon 2050 ».
Sur l’importance des « relations interpersonnelles » au sein de l’Union européenne, le Président du Mouvement Européen-France rappelle que ce n’est seulement que depuis une quinzaine d’années que les chefs d’Etats viennent seuls, et non plus accompagnés de leurs conseillers aux sommets européens. Ces modalités logistiques peuvent avoir une importance significative, comme l’affirme Yves Bertoncini qui souligne l’importance pour les chefs d’États de s’investir sur cette thématique particulièrement « clivante et difficile ». Cela engendre inévitablement un « choc des égos entre les chefs d’Etats et de gouvernements » puisque ce sont des thèmes particulièrement complexes, qui nécessiteront ensuite des « ajustements douloureux » pour que les accords puissent être mis en oeuvre. Cependant, Yves Bertoncini relève que « le paradoxe du pacte vert européen c’est qu’il n’est pas issu des rapports de force électoraux ». Au contraire, c’est un projet qui a été « poussé par la société civile européenne ». Yves Bertoncini affirme justement que le mérite de ce documentaire et de réussir à mettre des « visages sur des clivages, ce qui est rare dans la couverture des médias, en particulier en France ».
Une des règles fondamentales au sein du Conseil européen est celle de l’unanimité, et fait l’objet d’une analyse de la part des différents intervenants. Le Président du Mouvement Européen-France affirme que cette règle « a un pouvoir égalisateur entre les pays membres ». Ce documentaire nous permet donc d’analyser les « intérêts légitimes soulevés par le premier ministre polonais, notamment les intérêts industriels, la souveraineté et les enjeux identitaires », et donc la nécessité de trouver des compromis entre les pays pour pouvoir mettre en œuvre ces décisions. Cela peut s’avérer compliqué, notamment sur des sujets identitaires.
Enfin pour conclure, Yves Bertoncini tient à rappeler que l’Union européenne c’est avant tout, comme son slogan l’indique, « l’unité dans la diversité » et qu’il existe un « règlement pacifique des différends ». Par conséquent, lorsque des États sont en désaccord mais que « le différend est jugé légitime et que les chefs d’Etats s’écoutent entre eux, il est possible de trouver des mécanismes pour rallier les pays membres ». Le Président du Mouvement Européen tient ici à souligner que contrairement au Brexit, où le Royaume-Uni a souhaité quitter l’Union européenne, pour la Pologne, « il n’est pas question de s’en aller ». Ainsi, l’existence de différends est moins synonyme d’une volonté de retrait que de la recherche d’un compromis, comme en témoigne l’exemple polonais.
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