L’association Citoyennes pour l’Europe, membre du Mouvement Européen – France et la Coordination Française pour le Lobby Européen des Femmes (CLEF) et le think tank européen Gender 5+ ont organisé un colloque mercredi 6 février dernier, portant sur la situation des femmes en Europe et sur leur nécessité de voter aux élections européennes du 26 mai 2019.
En 2014, l’écart des votes entre les femmes et les hommes s’élevait à 12% alors que les femmes se sont battues durant plusieurs années afin d’avoir accès à ce droit. Dans son discours d’ouverture, Jocelyne Adriant-Mebtoul, présidente de la CLEF, souligne qu’il n’y a pas de démocratie sans femmes et que « leur vote et leur implication pour les élections européennes sont une nécessité ».
Sur le terrain, certaines femmes mènent plusieurs combats, comme cela est le cas de Maria Arena, Députée européenne belge, invitée pour introduire ce colloque. Au sein du Parlement européen, elle milite en faveur d’une répartition de la charge parentale au sein du couple, d’une représentation des femmes dans les conseils d’administration ainsi que des droits fondamentaux, mais déplore « le fait que ce ne soit que les femmes qui décident d’aller au combat lorsqu’il s’agit de questions de discrimination faites aux femmes ».
« L’Europe et les femmes, acquis et défis »
Cette première table ronde regroupait trois intervenantes aux carrières politiques, qui se sont exprimées sur la représentation de la femme à la fois dans le milieu politique, mais aussi dans différents domaines. Franziska Brantner, Membre du Bundestag et ex-parlementaire européenne souhaiterait qu’il y ait une plus grande prise de conscience de l’importance du vote aux élections européennes, surtout venant de la part des jeunes : « Pourquoi j’irais voter ? Regardez le Brexit, regardez les jeunes de moins de 24 ans qui disent à 75% vouloir rester au sein de l’Union européenne alors que pour les plus de 60 ans c’est l’inverse. La différence réside dans le fait que certains sont allés voter et les autres non. Si les jeunes s’étaient mobilisés pour aller voter, la situation ne serait pas telle. »
Maria Stratigaki, Vice-maire d’Athènes et professeure de gender studies à l’Université Panteïon d’Athènes s’est exprimée sur la place des femmes au pouvoir en rappelant que : « la démocratie paritaire peut être un rempart contre le populisme, il y a eu des progrès mais l’égalité réelle stagne en Europe et ces progrès sont menacés par les partis extrémistes ». En revanche, elle soulève que « dans un climat anti-européen, nous avons tendance à oublier les progrès importants qui ont été achevés par le Parlement européen dans l’égalité des genres. Même si il y a encore un chemin à parcourir, l’acquis est très important et doit être défendu ».
Enfin, Alazne Irigoien, doctorante et membre de G5+ et Young Feminist Europe a clôturé cette première table ronde d’une manière beaucoup plus critique en affirmant que « les femmes sont sous représentées en politique mais aussi dans tous les autres domaines de la société et la légitimité ainsi que le fonctionnement du système démocratique sont remis en questions quand les femmes ne sont pas là ». Selon elle, la démocratie paritaire va au-delà des chiffres et il faut surtout « faire des mesures en matière d’égalité ». Elle souligne que le problème subsiste dans le fait que « la démocratie paritaire voit l’égalité homme/femme comme une condition pour pouvoir parler de démocratie, et non pas comme une conséquence ». Par ailleurs, elle considère que pour parler de démocratie « il faudrait accroître la diversité afin que différents groupes de femmes soient représentés », c’est pourquoi « il faut redoubler d’efforts pour informer les citoyens qu’à l’heure actuelle il n’y a pas d’égalité ».
« Quelle Europe veulent les femmes ? »
Cette deuxième table ronde était formée par quatre intervenantes qui ont échangé sur leurs domaines d’activité, parfois connus pour être « trop » masculins, ainsi que sur la place qu’occupent les femmes travaillant dans ces milieux. Aujourd’hui, 35% des Européens estiment que les hommes sont plus ambitieux que les femmes, 17% estiment que les femmes n’ont pas les qualités nécessaires pour faire de la politique, alors 86% font confiance aux femmes pour les représenter.
Patricia Lamotte, assistante de la Directrice Générale Adjointe DG CONNECT de la Commission européenne, a tenu à rappeler que « l’Europe est relativement pionnière dans l’imposition de quotas, avec 45% de femmes travaillant à des postes de direction au sein de la Commission» mais elle s’accorde à dire qu’il y a trop peu de femmes dans le numérique, seulement 17%.
En ce qui concerne le changement climatique, Karine Gavand, Directrice du programme France European Climate Foundation, a tenu à rappeler « l’importance du vote de la femme, qui se trouve en première ligne sur les impacts de changement climatique », alors que paradoxalement, « ce sont essentiellement des hommes qui négocient les accords sur le climat ».
Isabelle Chmitelin, Directrice de l’Ecole vétérinaire de Toulouse et ancienne Directrice Générale Adjointe de l’alimentation a suscité quelques critiques lorsqu’elle a affirmé que « le plafond de verre était celui que l’on se mettait à nous même ». Elle souligne qu’aujourd’hui, il y a 80% d’étudiantes en filière vétérinaire ce qui n’était pas le cas il y a quelques années. Par ailleurs, Isabelle Chmitelin précise que « grâce à l’Union européenne, des normes se sont imposées aux abattoirs et au lieu de communiquer positivement sur cela, nous préférons communiquer sur la fraude et les scandales ». Selon elle, « notre rôle est d’inciter les jeunes à aller voter car l’Europe de demain sera la leur ».
Enfin, Odile Quintin, Professeure ESCP – Europe, Présidente du cercle Erasmus et Conseillère, chargée du Conseil d’orientation stratégique au sein de Mouvement Européen – France, a rejoint sur quelques points Isabelle Chmitelin : « j’ai crevé le plafond de verre sans pour autant être militante, bien que je veuille l’égalité homme/femme ». Elle souligne que rien n’est jamais simple pour les femmes, qui sont habituées à faire plusieurs choses à la fois et « cela oblige à affronter les complexités des situation beaucoup plus facilement ». Odile Quintin continue de vanter les bienfaits des programmes Erasmus qui « permettent d’apprendre sur les autres et donnent l’envie de ne pas rester coincé dans sa zone de confort ». Elle appuie ses propos en affirmant que « le programme Erasmus a changé les valeurs européennes et une génération toute entière, mais malheureusement nous n’en parlons pas assez dans les médias ».
Pour clôturer ce colloque, la Présidente de la CLEF, Gwendoline Lefebvre, a insiste sur le fait que « les femmes peuvent exiger une Europe qui assure l’égalité à tous les niveaux et qui place les femmes et leurs droits au centre ». Martine Meheut, Présidente de Citoyennes pour l’Europe et Conseillère, chargée des relations avec le 3ème Collège au Mouvement Européen – France tenait à faire passer un message très clair : « ces élections européennes ont un enjeu considérable par rapport aux principes fondamentaux de l’Union européenne et aux valeurs de l’Europe, notamment en ce qui concerne les femmes ».